Evolution des métiers de la Net Economie

 

 

Rappelons qu’en Mai 2010, Fabrice de Sèze nous avait présenté l’état de sa réflexion d’alors sur ces sujets qu’il connaît bien. Grâce à son expérience chez Alcatel notamment et au sein de Highview Média dont il est associé, il est en mesure de nous faire apprécier l’ampleur des changements et de nous aider à comprendre ce secteur complexe.

 

Historique

Le métier des télécoms en France a commencé à entrer dans sa phase « moderne » à partir de la privatisation de France Telecom (date ?). C’était la fin d’un monopole puissant, avec son école, sa recherche, sa culture…

C’était aussi l’arrivée du GSM, pour lequel il a fallu 10 ans avant qu’il ne devienne rentable. Il ne faut pas oublier que ce sont les Européens qui, dans les années 1980, ont inventé le GSM et plus particulièrement la France (au CNET). Puis, fin 1990, Motorola s’est imposé en faisant valoir ses brevets. Du coup, l’Europe s’est « refermée » dans ce créneau.

L’étape suivante a été la bulle de la 3G, avec une première libéralisation la concernant en 1990, suivie en 1995, par la libéralisation du fixe.

On a estimé que, pour couvrir le territoire avec un réseau suffisant, il était nécessaire d’investir 1.5 milliards d’Euros. Il y avait place pour 3 opérateurs, pensait-on.

En 2000, le GSM était devenu une vraie « vache à lait ». Allait-on entrer dans une phase d’enchères et accepter l’arrivée d’un 4ème opérateur ? France Telecom et SFR n’en voulaient pas.

Dans les dernières années, l’Ebitda du secteur était de 30 à 45 %, le besoin en investissement, de 10 à 15 %.

Voici les chiffres clés pour 2010 et 2012, en milliards d’€ :

                                                                                  2010                           2012

                       CA France                                          21                              20

                       Investissements                                   2                               3.6

L’année 2012 a été celle de l’achat de nouvelles fréquences.

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Depuis 2006, on observe une tendance forte vers la convergence des usages. En même temps, on assiste à un va-et-vient pour ce qui concerne l’intégration fixe/mobile. C’est la période du succès de Vodaphone. Jusqu’à 2000, l’usage prédominant, c’est la voix aussi bien en fixe qu’en mobile. Puis, avec l’évolution vers le multimédia, l’enjeu n’est plus le réseau, mais les services.

A l’époque, chez Alcatel, on a vu arriver le mobile BlackBerry et on s’est dit que RIM avait été génial de penser à l’utilisation de l’ensemble de la chaîne et à la facilité d’usage, avec accès aux mails, etc. On arrivait donc au terminal multimédia et à l’avancée en force d’Apple sur ce créneau prometteur.


La situation aujourd’hui

Aujourd’hui, on peut distinguer 4 types d’opérateurs :

-       Les historiques : France Télécom (90.000 personnes) ; Deutsche Telekom

-       SFR (10.000 personnes) ; Vodaphone

-       Bouygues Télécom

-       Les MVNO (« Mobil Virtual Network Operator ». Un opérateur qui ne possède pas de fréquence radio ou de réseau sans fil) : Virgin, …

Free est considéré comme étant « hors catégorie ». Dans la profession, on ne sait pas bien où va aller Free. Il investit un strict minimum et profite de son contrat (secret) avec Orange. Free limite le débit. A quand son renouvellement ?

Les MVNO sont les plus pénalisés.

Globalement, depuis 2006, le revenu de la profession en France a baissé de 8%. Il représente 3% du total des ménages. A titre de comparaison, les revenus des producteurs de gaz sont en croissance de 36%, ceux de l’électricité de 16%.

Pour les télécoms, de 2011 à 2012, le volume est en croissance de 16%. C’est l’effet de l’accroissement des SMS et, surtout, des données (+72%). Les jeunes ne s’envoient pas de mails. Ils n’utilisent que les SMS (et Facebook).


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Actuellement, c’est la 4G qui arrive. Il s’agit d’une nouvelle technologie, liée à la basse fréquence. Dans les fréquences basses, la propagation est faible. Environ 1/3 de la bande à 800 Mega H est en train d’être libérée par la TV.


Spécificités du Marché 

Dans les entreprises de télécom, il y a deux mondes : le monde technique et le monde commercial (important surtout avec l’arrivée des portables). Il semblerait souhaitable que ces deux parties soient séparées.

D’autre part, il y a le local par rapport au global. Peu d’entreprises ont réussi à s’implanter au niveau global, à l’exception de Vodaphone, et encore… Lorsque les opérateurs nationaux s’implantent dans d’autres marchés, on applique les mêmes recettes et ça ne marche pas, généralement pour des raisons culturelles. Vodaphone est partout N° 2.


Interactions avec les Majors

Les opérateurs télécom ont une proximité avec leurs marchés mais ont besoin d’interagir de façon optimale avec ce que les anglo-saxons appellent les « Fab Five » - en quelque sorte les cinq majors – qui sont :

-       Amazon

-       Microsoft/Skype

-       Apple

-       Facebook

-       Google

Les majors et les opérateurs télécom sont dans une relation d’interdépendance. Les uns ont besoin des autres pour réussir. Qui dominera dans cette constellation ?

Les majors investissent massivement sur le logiciel et sont réellement mondialisés. Les opérateurs, pour réussir, sont amenés à proposer des « écosystèmes de services » incluant les offres des majors.

Les opérateurs paraissent plus à même de construire un capital de confiance avec leur client, établissant, dans ce but, comme Orange, des magasins dans tout le pays. Mais les jeunes, qui sont une clientèle importante, ne vont pas dans les magasins Orange…


Stratégies possibles

Pour ce qui concerne les opérateurs télécom, trois stratégies sont possibles :

  1. Fournisseurs de services, sans aller jusqu’à jouer le jeu des majors (« OTT = Over The Top »).

Pour ce qui concerne les stratégies des types 2 ou 3, les facteurs de réussite sont les suivants :

-       Aller dans le sens de la personnalisation.

-       Qualité de la relation avec les utilisateurs.

-       Efficacité en termes de coût (haut débit).

-       Simplification des modes opératoires.

-       Clarté de la stratégie.

Les opérateurs télécom aux Etats-Unis, dont le nombre est aujourd’hui très réduit, sont, sur le plan de la rentabilité, en excellente santé.